© Galerie Thaddaeus Ropac - Paris - Sylvie Fleury
Sylvie Fleury - Sculpture Nails
du 11 Jan. au 22 Fev 2025
Galerie Thaddaeus Ropac
7 Rue Debelleyme
75003 Paris
https://ropac.net
L'exposition Sculpture Nails à la galerie Thaddaeus Ropac Paris Marais retrace la contribution majeure de Sylvie Fleury à notre compréhension du médium sculptural. Au rez-de-chaussée de la galerie, l’artiste suisse présente une sélection de sculptures – comprenant des œuvres historiques et des créations inédites – qui couvrent plus de 30 ans de carrière. À l’étage, les visiteurs découvriront un espace immersif, uniquement illuminé par la lumière des célèbres œuvres au néon de l’artiste.
Les sculptures exposées au rez-de-chaussée de la galerie, regroupant divers types, matériaux et formats, sont présentées sans hiérarchie ni chronologie, dans un esprit d’abondance et de générosité. Cette présentation représente ce que Fleury décrit comme une réinterprétation de la galerie traditionnelle de sculptures institutionnelles. En jouant avec cette manière établie d’exposer des sculptures, l’artiste transforme des objets et des marques de luxe – qu’il s’agisse de ready-mades ou de créations en bronze, laiton ou fibre de verre – en les intégrant dans cet espace, suscitant des questions sur leur fétichisation, leur valorisation et leur consommation. Des piles de magazines, des emballages de maquillage et des chaussures Alaïa moulées en bronze côtoient une barrette abstraite de trois mètres de large et une sélection des œuvres Mushroom de l’artiste, constituant un panorama varié du vocabulaire sculptural de Fleury au fil des années.
En utilisant des matériaux et des procédés associés au conceptualisme, au minimalisme et même à l’Arte Povera, les sculptures présentées dans cette exposition s’inspirent à la fois de la culture populaire et de la consommation, mais aussi de l’histoire de l’art. Les références « tendrement irrévérencieuses » de Fleury au canon artistique – souvent masculin – deviennent des terrains de jeu créatifs où elle explore comment ces stratégies peuvent s’articuler et reformuler les questions centrales de sa pratique. Par exemple, un tapis de yoga (2001-2002), moulé en bronze avec le motif emblématique de Gucci en relief, invite à une comparaison formelle avec les sculptures au sol de Carl Andre, tandis que le monumental diptyque Untitled - (Pistoletto)/Beauty Case (2024), exposé ici pour la première fois, fait un clin d’œil aux Mirror Paintings de l’artiste italien Michelangelo Pistoletto.
En combinant un sol-miroir avec des images tirées de son œuvre vidéo précoce Beauty Case (1995), l’hommage de Fleury à Pistoletto reflète les sculptures environnantes, ainsi que le spectateur, les intégrant dans un dialogue avec l’œuvre elle-même. Cette interaction incarne l’idée sous-jacente à l’exposition selon laquelle les dialogues et les juxtapositions peuvent créer de nouvelles significations et des connexions surprenantes. Une image fixe tirée de Beauty Case montre Fleury, dos au spectateur, vêtue d’une robe et de talons hauts, tentant de ranger sa trousse de beauté dans le coffre de sa Buick Skylark de 1967. La Buick, motif récurrent dans son œuvre depuis les années 1990, est utilisée pour ironiser sur sa conception comme symbole de masculinité.
Une dimension féministe puissante
Un fil rouge féministe traverse toute l’exposition, ainsi que l’ensemble de la pratique de Fleury. Des montagnes de boîtes de poudre de milkshake Slim-Fast moulées en bronze – vanille, café au lait, fraise – jouent sur les idées d’excès et de restriction. Ces substituts de repas, destinés aux femmes souhaitant perdre du poids, sont transformés par l’artiste en un commentaire sur les promesses non tenues de la consommation, dans un contexte où la pression sur les femmes pour atteindre des normes de beauté inatteignables ne cesse d’augmenter. À côté, les Gucci Handcuffs (menottes Gucci, 2001-2002) de Fleury suggèrent une inquiétante réflexion sur la manière dont le luxe et la beauté peuvent davantage nous emprisonner que nous libérer.
Les œuvres au néon
Les œuvres au néon exposées couvrent deux décennies d’exploration par Fleury de ce médium. À l’instar de nombreuses sculptures, elles constituent un geste historique, s’inspirant du principe de l’artiste conceptuel Joseph Kosuth selon lequel « l’art consiste à créer du sens ». Fleury relie cette réflexion à des slogans et des jingles, s’en servant de manière provocante pour interroger les mécanismes de l’industrie de la beauté. Les noms de parfums – Hypnotic Poison de Dior, Ô de Lancôme et Eternity Now de Calvin Klein – sont instantanément reconnaissables grâce à leurs polices distinctives. D’autres néons, comme ceux de 2001-2002, affichent des impératifs tels que Exfoliate, Hydrate, Shield, Purify, comme le ferait une marque de soins de la peau. Une œuvre de 2005, BUY ME, brille, déconstruisant les messages d’une industrie qui pousse les femmes à consommer en jouant avec ses propres codes.
Parmi elles, le célèbre néon YES TO ALL – peut-être le message néon le plus connu de l’artiste – fait référence à une commande informatique classique. Installée récemment sur la façade du Petit Palais à Paris (2019) et à l’entrée de la Pinacoteca Agnelli à Turin (2022), cette œuvre capte la frénésie des stimuli, la rapidité et l’enthousiasme du consumérisme dans le monde post-numérique, les suspendant dans l’espace comme des étoiles guides dans une ère d’excès.
À propos de l’artiste
Née en 1961 à Genève, où elle vit et travaille, Sylvie Fleury a présenté sa première exposition Shopping Bags en 1991. Depuis, elle a exposé dans de nombreuses institutions en Europe et aux États-Unis. Ses récentes expositions personnelles incluent le Kunsthal Rotterdam (2024), le Kunst Museum Winterthur (2023), la Pinacoteca Agnelli à Turin (2022), et bien d'autres. Lauréate du Prix Meret Oppenheim en 2018 et du Prix de la Société des Arts de Genève en 2015, Fleury s’est imposée comme une figure incontournable de l’art contemporain.